
UN MARDI. Un jour de tempête de sable qui rend le désert si hostile. Une lueur éclaire soudain la nuit.
A 8 km de Gourma-Rharous, au Mali, l'hélicoptère transportant
Thierry Sabine, Daniel Balavoine, François-Xavier Bagnoud, Jean-Paul Lefur, Nathaly Odent s'écrase.
La voix qui chaque matin au bivouac promettait des heures de souffrance et de passion aux concurrents
se tait à jamais. Thierry Sabine avait 36 ans.
« Je le revois encore descendant de son hélico, raconte Dominique Sauvêtre,
autre ami. Il s'adressait aux Africains d'une façon tellement solennelle, en levant les bras,
qu'on l'avait surnommé Jésus. Il en riait. Le matin au bivouac, il haranguait les foules, debout
sur un camion. On aurait dit Napoléon. Alors forcément, il y avait des grognards qui grognaient.
Sabine était le symbole de la galère quotidienne. »
« Faire vibrer ceux qui partent, faire rêver
ceux qui restent. » Vingt huit ans après, ces paroles de Thierry Sabine sont encore gravées dans
beaucoup d'esprits sur l'actuel rallye-raid. « Le dépassement de soi, c'est ce qu'on vient chercher
ici, explique le motard Guillaume Floirac. Je suis trop jeune pour avoir connu Sabine
mais je me souviens que mon père rêvait de faire le Dakar. Je ne pense pas que je serais capable
de partir avec une boussole comme à l'époque mais, aujourd'hui encore, on souffre. Et on vient
pour ça. Cet esprit qu'avait lancé Thierry Sabine est encore présent. »
« Je suis tout de même un peu nostalgique de cette époque, avoue-t-il. Sabine m'a donné
cette envie d'aventure, de voyages. Il fallait survivre et on s'entraidait. Aujourd'hui, les
motards pensent davantage à leur classement. Il n'y avait pourtant pas que du bon avec Sabine.
On se paumait pas mal et on avait faim ! »
« Je me souviens d'une étape de 1 150 km dont 800
de spéciale, raconte Cyril Neveu. Seuls quatre concurrents avaient terminé dans les temps. Mais
cette course est si forte qu'elle a survécu à la mort de Thierry. Je ne pense pas qu'il aurait
continué longtemps. Il serait certainement parti vers d'autres pays, comme l'Amérique latine.
Partage